Le pace, le pace, le pace : sommes-nous obsédés par le pace?
Quand j'ai commencé la course en 2014 j'étais vraiment motivé, un peu comme un enfant, je découvrais un sport complètement nouveau.
Un sport tellement dur que j’ai vite compris que j’aurai besoin de certains trucs pour rester motiver.
Un de ces trucs ? Les chiffres.
La course c'est le sport le plus impitoyable qui soit : nos progrès sont mesurés de façon 100% objective. Impossible de tricher.
(Bon vous pouvez toujours dire qu’il y avait du vent, de la neige, ou que votre intestin et sensible, mais voilà quoi …)
Or les progrès sont une des plus grandes sources de motivation en course à pied.
Courir plus vite, plus longtemps, ça fait du bien !
Au début c'est sympa, la courbe de progression est en notre faveur. Tu fais un record à chaque course, c’est cool.
Tu peux même gagner plusieurs minutes sur ton 10k.
Mais avec le temps … la progression se ralentit.
Le problème durant mes premières années, c'est que j’ai sauté à pieds joints dans cette frénésie du chrono, du pace, de la Vo2max, l'obstination pour les chiffres quoi.
Même quand je ne courais pas, je calculais toutes sortes de choses.
Le chrono que je pourrai faire dans 6 mois, 1 an, 2 ans.
Le pace que je pourrai tenir au prochain entrainement.
Je calculais même mon temps que j’allais faire … en plein milieu d’une course.
Tout bien réfléchi, j’étais devenu un expert-comptable.
Heureusement, avec le temps, mon obsession pour les chiffres s’est tassée.
Ce qui m’a ouvert les yeux, c’est quand je suis devenu entraineur.
Je me suis rendu compte que la plupart des coureurs se rendaient fous eux aussi.
(Bon certain plus que d’autres …)
Le problème avec les chiffres ?
Une fois qu’ils nous rentrent dans la tête, ils alimentent la roue du hamster.
Vous connaissez le hamster ?
Cette voix qui nous martèle avec des chiffres avant, pendant et après l’entrainement.
Cette fatigue cognitive, c’est le premier problème.
Mais, il y en a un second :
Avez-vous déjà porté attention à l’expression suivante : "Je vaux 20 minutes au 5k" ?
"Je vaux"
Le coureur lie sa valeur personnelle à son chrono.
Tout à coup, cette valeur, ou estime de soi devient totalement mesurable.
C'est peut-être ça le problème.
Un jour, vous ne progresserez plus aussi vite, vous aurez même une ou plusieurs années sans record.
Si vous avez fonctionné avec les chiffres toute votre carrière, votre motivation et votre santé mentale pourraient connaitre un coup dur.
C’est pour cela que j’encourage mes athlètes à courir aux sensations.
Je crois sincèrement que le monde de la course gagnerait à se recentrer sur ses sensations.
Apprendre à faire confiance à notre corps et ne plus laisser les chiffres définir notre valeur sociale.
Je crois que nous pouvons aimer la course avec moins de chiffres.
Et tenez-vous bien ...
Je pense que nous pouvons davantage performer avec moins de chiffres.
La performance n'est pas une mauvaise chose, mettre toute son énergie dans un projet un peu fou, peut-être impossible, c’est excitant !
C'est découvrir de quoi nous sommes réellement capables.
Mais si la performance se mesure avec des chiffres, en aucun cas ils ne sont nécessaires pour performer.
J'ai fait ce travail sur moi durant ces derniers mois, et savez-vous quel est le sentiment qui m’a habité ?
Le soulagement : je me suis senti libéré.
Je fais également ce travail avec les coureurs que j'accompagne, et je constate de nombreux bénéfices : meilleure gestion de courses, plus de plaisir à l’entrainement, moins de stress avant une grosse séance, une meilleure gestion de la fatigue à long terme, etc.
Mon dernier conseil ?
Essayez de vous entrainer aux sensations (par exemple 6x3’ effort 5k) et regardez votre allure comme une indication de votre effort et de votre niveau de forme.
Le comportement inverse qui consiste à suivre religieusement l’allure prescrite par sa montre est selon moi souvent une belle erreur.
Bonne course 😉
Max